14 avril 2141, New York, États-Unis.

Nous sommes arrivés. Nous sommes entrés dans la capitale. Au dehors, le monde n’est plus qu’une guerre sans fin, qui gronde et ne s’est pas tue depuis l’extinction du vingt-et-unième siècle. Mes parents n’ont jamais connu la paix dont parlent les livres d’histoire qui ressemblent désormais à des recueils de contes anciens. Moi, je n’ai connu que la fuite. J’ai connu la faim, le froid et la peur. J’ai côtoyé la mort de bien trop près. Les gens qu’on enferme dans les cités hologrammées ignorent tout de la réalité de l’extérieur.
De notre réalité.
De celle que nous avons enfin laissée derrière nous.
Nous avons lutté, pendant des semaines, des mois, nous avons tenu bon et, aujourd’hui, enfin, notre requête a été acceptée. Nous sommes devenus des citoyens de New-York, des exemples d’insertion d’étrangers que l’on arrache à l’Ancien Monde et à qui l’on accorde une seconde chance au coeur de l’Eden. Jenesis a reconnu la pureté de nos âmes et le bien-fondé de nos intentions. Jenesis nous a écoutés, et entendus. Jenesis nous a vus, jugés, et approuvés. Elle nous a offert un refuge, elle nous a fait membres de cette société à l’élite immaculée. Nous avons découvert notre couleur, et notre valeur.
J’ai compris pourquoi nous nous étions battus si longtemps lorsque j’ai vu des gens marcher dans les rues sans s’inquiéter et des enfants rire aux éclats dans les supermarchés. Ici, personne n’a peur. Personne ne craint la violence, ni la mort qu’autrui donne parfois.
Ici les gens sont blancs, ou bleu ciel, ou rose pastel. Ici les hommes sont paisibles et personne ne craint ses voisins. Ici ils dorment la nuit, et ne verrouillent plus leurs portes quand ils s’en vont.
Jenesis a créé la société parfaite, de bonheur et de sérénité.
Et aujourd’hui, nous en sommes devenus des citoyens modèles.
Des citoyens à la teinte immaculée. (plus ?)